Cette analyse s’intéresse à la pièce mixte pour percussion et bande Claustrum (1996-1997) de Luis Naón. Prenant pour objet d’étude non l’œuvre en soi, mais son processus de composition, notre analyse vise à mettre en évidence les influences des dispositifs technologiques sur le travail compositionnel, particulièrement sur la conception des hauteurs, du rythme, de la forme. Après avoir établi un dossier génétique rassemblant diverses sources primaires recueillies sur Claustrum (cahier personnel tenu durant le travail de composition, esquisses, plans formels, partitions de travail, enregistrements sonores), nous avons mené deux entretiens (2011) avec le compositeur. L’examen du dossier génétique sert ainsi à dépasser les commentaires autoanalytiques préexistants, le compositeur ayant consacré sa thèse de doctorat au cycle d’œuvres auquel appartient Claustrum. Bien que Claustrum soit rétrospectivement dénommée opus “6” par le compositeur au sein de son cycle Urbana, elle est chronologiquement placée en position “-1” : c’est juste après son expérience pour Claustrum que le compositeur a entrepris son grand cycle avec Urbana (1997-1998), la pièce éponyme du cycle. Aussi, nous interrogeons ici les liens de Claustrum avec plusieurs pièces ultérieures du cycle. Cette analyse permet de déceler une pensée compositionnelle presque indifférenciée en terme d’instrumentarium (instrumental ou électronique). Le compositeur ancre davantage son travail dans un imaginaire métaphorique (par ex. jeux d’enfermements mutuels) et numérique (par ex. relations de proportionnalité), l’amenant à redévelopper ultérieurement certaines idées dans d’autres compositions du cycle, mixtes et non mixtes.
Noémie Sprenger-Ohana
(Université de Lille-Nord de France (UDL3-CEAC) / Laboratoire STMS (Ircam-CNRS-UPMC)
Après une Licence Arts et technologies à l’université de Marne-La-Vallée, Noémie Sprenger a obtenu un Master de musicologie à l’université de Paris-Sorbonne, en Musiques électroacoustiques (dir. M. Battier), et en Médiation musicale (partenariat avec l’Orchestre National d’Ile-de-France). Recherchant à évaluer les impacts des technologies électroacoustiques et informatiques sur la création musicale contemporaine, elle s’est aussi attelée à l’analyse des musiques acousmatiques et mixtes dans des réalisations multimédias (œuvres de F. Bayle pour le GRM, pièce de E. Cipollone pour l’Ircam…). Actuellement doctorante à l’université de Lille-Nord de France, elle convoque dans son projet de thèse (dir. V. Tiffon) les méthodes croisées de l’analyse génétique et de l’entretien, en vue d’étudier certains cas de processus de composition d’œuvres mixtes à partir des années 80. Accueillie à cet effet dans l’équipe Analyse des pratiques musicales de l’Ircam, elle y a également mené depuis 2009 une recherche approfondie sur le processus de composition de Traiettoria de Marco Stroppa, en collaboration avec le musicologue V.Tiffon, dans le cadre du projet ANR MuTeC.