Notre communication se propose d’analyser la démarche compositionnelle à partir de l’étude comparative du matériau sonore et du geste musical dans deux œuvres mixtes éloignées de presque cinq décennies : Violostries (1964, pour violon et bande magnétique) de Bernard Parmegiani et Eden (2011, pour ensemble instrumental et sons fixés) de Christophe Havel.
Dans Violostries, Parmegiani parvient à l’unité sonore de l’œuvre par l’inclusion et la transformation de sons enregistrés du violon dans la bande. Les gestes instrumentaux captés par le microphone, caractéristiques de la virtuosité violonistique, sont sources de gestes sonores et façonnent le profil énergétique de l’œuvre. De fait, le matériau initial est de nature acoustique et conditionné par la pratique instrumentale. Au contraire, dans Eden Havel emprunte la démarche inverse : il construit son œuvre à partir de l’enregistrement systématique de différents gestes producteurs de sons (frapper, gratter, taper, etc.) sur trois matériaux différents (la pierre, le bois et le métal), définissant ainsi une grammaire gestuelle qui sera à la base de la construction du discours formel. Ainsi, la cohérence de l’œuvre est assurée non pas tant par l’uniformité du matériau sonore que par l’unicité de la grammaire gestuelle.
L’interaction des deux mondes sonores présents dans la musique mixte nous oblige à prendre en considération la démarche du compositeur dans l’analyse de son œuvre. Nous étudierons de quelle façon le matériau et le geste musical sont interdépendants dans la musique mixte afin de leur donner une place primordiale dans l’analyse de celle-ci.
Christophe Havel
Membre fondateur et co-directeur artistique de Proxima Centauri, il enseigne la composition musicale au Conservatoire National de Région de Bordeaux et à l’École Supérieure de Musique de Catalogne à Barcelone (esmuc). Chercheur associé au LaBRI (Laboratoire Bordelais de Recherche en Informatique) de l’Université de Bordeaux 1. En tant que compositeur, il développe actuellement une écriture mettant en relation l’instrumentiste et l’ordinateur dans des structures ouvertes utilisant essentiellement des sonorités synthétiques. Dans cette perspective, il est l’initiateur d’une recherche sur la captation du geste du percussionniste au Scrime (Studio de Création et de Recherche en Informatique et en Musique Électroacoustique) de l’Université de Bordeaux 1.
Luis Velasco Pufleau
Docteur en Musique et musicologie à l’Université Paris-Sorbonne – études musicales aux Conservatoires de Bordeaux, Agen et Paris XVI (guitare, analyse, musique de chambre contemporaine et composition électroacoustique) –, il est chercheur post-doctorant au Centre de recherches sur les arts et le langage (CRAL) de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS). Ses recherches portent, d’une part, sur la collaboration entre l’interprète et le compositeur dans la création musicale contemporaine et, d’autre part, sur l’utilisation symbolique de la création musicale à des fins de légitimation politique par les régimes autoritaires et totalitaires du XXe siècle. Il est chargé de cours au Département des Arts (musicologie) de l’Université de Bordeaux 3 et au Centre de Formation à l’Enseignement de la Musique et de la Danse (CEFEDEM) d’Aquitaine.